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jeudi 10 mars 2011

Fernando Savater, El gran laberinto

Mientras iban por la calle camino de la librería, Fisco y Jaiko jugaban a que eran astronautas recién llegados a un mundo desconocido y previsiblemente hostil.
— ¡Cuidado, a tu derecha! Viene un monstruo rarísimo que lleva en alto una especie de enorme murciélago negro cogido por una pata. Puede ser peligroso...
— Espera, voy a consultar nuestro Informador Universal Portátil. Conectando, conectando... No te preocupes, no muerde. Se llama «paraguas».
— ¿El monstruo?
— No, hombre, eso que parece un murciélago.
— Fíjate, en lo alto de ese árbol sin ramas hay un ojo rojo. ¡Caray, ahora guiña el ojo y nos mira con otro amarillo!
— Y esas tortugas gigantes que pasan a toda leche lanzando rugidos. ¡Qué fieras! Hay muchísimas... Deben ser un rebaño en estampida. ¡Cuidado, apártate de su camino!
— ¡Atención, el ojo de) árbol es ahora verde! Ese árbol en vez de pájaros tiene ojos de colores...
— Mira, el rebaño de tortugas ?¿o serán estegosauros?? se ha parado. ¿A qué esperarán?
— Ni idea, pero podemos aprovechar para intentar esquivarlas corriendo hasta allí enfrente.
— ¿Y si están al acecho y nos atacan?
— ¡Nada, hay que arriesgarse! Pero deprisa, ¿eh? A la de una, a la de dos... ¡vamos allá!
Y cruzaban de acera a todo correr, muertos de risa. Mejor dicho, vivos de risa, porque cuanto más se reían Fisco y Jaiko más vivos estaban. ¿Qué edad tenían? Pues la verdad es que resulta difícil establecerlo a simple vista: ¡los chicos de ahora crecen tanto! Desde luego no menos de trece años pero en ningún caso mucho más de catorce. Jaiko parecía un poco mayor, pero es porque era más corpulento, todo un atleta: muy moreno, a causa de que alguno de sus abuelos o bisabuelos procedía del Caribe y le habían legado un tono como de miel en la epidermis y un pelo de brillante azabache. En cambio Fisco era más menudo, casi rubio, todo fibra enérgica y grandes ojos curiosos. Siempre se les veía juntos, en el patio del colegio, por la calle, en el cine y lo mismo compartían los bocadillos que los secretos. También sus inquietudes: porque a pesar de su ánimo juguetón y hasta pícaro (era difícil verles en la cara otra expresión que la sonrisa, a menudo satírica) se diría en ocasiones que llevaban a medias la llave de un cuarto oscuro e íntimo en el que se oía el rebullir de cosas extrañas. Amenazadoras.

***

Pendant qu’ils marchaient dans la rue, de retour de la librairie, Fisco et Jaiko faisaient comme s’ils étaient des astronautes tout juste arrivés dans un monde inconnu et probablement hostile.
— Attention, à ta droite ! Il y a un monstre très bizarre qui arrive et qui tient en l’air une espèce d’énorme chauve-souris noire par une patte. Ça peut être dangereux…
— Attends, je vais consulter notre Informateur Universel Portable. Ça charge, ça charge… Ne t’inquiètes pas, ça ne mord pas. Ça s’appelle « parapluie ».
— Le monstre ?
— Non, voyons, ce truc qui ressemble à une chauve-souris.
— Regarde, en haut de cet arbre sans branches, il y a un œil rouge. Mince, maintenant il le cligne et il nous regarde avec un autre qui est orange.
— Et ces tortues géantes qui passent à toute berzingue en rugissant ! Quelles sauvages ! Il y en a énormément… Ça doit être un troupeau en déroute. Prends garde, écarte-toi de leur chemin !
— Attention, l’œil de l’arbre est vert à présent ! Au lieu d’oiseaux, cet arbre a des yeux colorés…
— Regarde, le troupeau de tortues – Ou alors, ce sont des stégosaures ? –, il s’est arrêté. Qu’est ce qu’ils peuvent bien attendre ?
— Aucune idée, mais on peut en profiter pour essayer de les esquiver en courant jusque là-bas, en face.
— Et si elles étaient à l’affût et qu’elles nous attaquaient ?
— Mais non, il faut prendre des risques ! Mais vite, hein ? À la une, à la deux… allons-y !
Et ils changèrent de trottoir à toute vitesse, morts de rire. Ou plutôt, vivants de rire, parce que plus Fisco et Jaiko riaient, plus ils étaient vivants. Quel âge avaient-ils ? Eh bien, en vérité, il est difficile de le déterminer d’un simple regard : les enfants d’aujourd’hui grandissent tant ! Bien sûr, pas moins de treize ans mais, en aucun cas, beaucoup plus de quatorze. Jaiko avait l’air un peu plus vieux, mais c’est parce qu’il était plus corpulent, un véritable athlète : très brun, parce que l’un de ses grands-parents ou arrières grands-parents venait des Caraïbes et qu’ils lui avaient légué une couleur semblable au miel sur l’épiderme et des cheveux brillants, noirs de jais. En revanche, Fisco était plus menu, presque blond, très énergique et aux grands yeux curieux. On les voyait toujours ensemble, dans la cour du collège, dans la rue, au cinéma et ils partageaient autant leurs sandwichs que leurs secrets. C’était aussi le cas pour leurs inquiétudes : car malgré leur humeur joueuse et même maligne (il était difficile de voir sur leur visage une expression autre que le sourire, souvent satirique), on aurait parfois dit qu’ils portaient en partie la clé d’une pièce intime et sombre où on entendait la mise en mouvement de choses étranges. Menaçantes.

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