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vendredi 8 octobre 2010

Miguel Ángel Asturias, El Señor Presidente

Miguel Cara de Ángel, el hombre de toda la confianza del Presidente, entró de sobremesa.
—¡Mil excusas, señor Presidente! —dijo al asomar a la puerta del comedor. (Era bello y malo como Satán)—. ¡Mil excusas, Señor Presidente, si vengo-ooo... pero tuve que ayudar a un leñatero con un herido que recogió de la basura y no me fue posible venir antes! ¡Informo al Señor Presidente que no se trataba de persona conocida, sino de uno así como cualquiera!
El Presidente vestía, como siempre, de luto riguroso: negros los zapatos, negro el traje, negra la corbata, negro el sombrero que nunca se quitaba; en los bigotes canos, peinados sobre las comisuras de los labios, disimulaba las encías sin dientes, tenía los carrillos pellejudos y los párpados como pellizcados.
—¿Y se lo llevó adonde corresponde?... —interrogó desarrugando el ceño...
—Señor...
—¡Qué cuento es ése! ¡Alguien que se precia de ser amigo del Presidente de la República no abandona en la calle a un infeliz herido víctima de oculta mano!
Un leve movimiento en la puerta del comedor le hizo volver la cabeza.
—Pase, general...
—Con el permiso del Señor Presidente...
—¿Ya están listos, general?
—Sí, Señor Presidente...
—Vaya usted mismo, general; presente a la viuda mis condolencias y hágale entrega de esos trescientos pesos que le manda el Presidente de la República para que se ayude en los gastos del entierro.
El general, que permanecía cuadrado, con el quepis en la diestra, sin parpadear, sin respirar casi, se inclinó, recogió el dinero de la mesa, giró sobre los talones y, minutos después, salió en automóvil con el féretro que encerraba el cuerpo de ese animal.
Cara de Ángel se apresuró a explicar:
—Pensé seguir con el herido hasta el hospital, pero luego me dije: «Con una orden del Señor Presidente lo atenderán mejor.» Y como venía para acá a su llamado y a manifestarle una vez más que no me pasa la muerte que villanos dieron por la espalda a nuestro Parrales Sonriente...
—Yo daré la orden...
—No otra cosa podía esperarse del que dicen que no debía gobernar este país...
El Presidente saltó como picado.
—¿Quiénes?
—¡Yo, el primero, Señor Presidente, entre los muchos que profesamos la creencia de que un hombre como usted debería gobernar un pueblo como Francia, o la libre Suiza, o la industriosa Bélgica o la maravillosa Dinamarca!... Pero Francia..., Francia sobre todo... ¡Usted sería el hombre ideal para guiar los destinos del gran pueblo de Gambetta y Víctor Hugo!

***


Miguel Tête d'Ange, le bras droit du Président, arriva alors que tout le monde s'attardait à table.
— Mille excuses, Monsieur le Président! -lança-t-il en passant la tête par la porte de la salle à manger. (Il était beau et mauvais comme Satan)-. Mille excuses, Monsieur le Président, j'arriiii-iiive... mais j'ai du aider un bûcheron qui avait récupéré un blessé dans les ordures et je n'ai pas pu venir avant! Je tiens à informer Monsieur le Président qu'il ne s'agissait pas d'une personne connue, mais de Monsieur tout-le-monde!
Le Président portait rigoureusement, comme toujours, ses habits de deuil : les chaussures noires, le costume noir, la cravate noire, le chapeau noir qu'il ne quittait jamais; sous sa moustache blanche, lissée sur les commissures de ses lèvres, il cachait ses gencives édentées. Il avait les joues flasques et ses paupières avaient l'air pincées.
— Il l'a donc conduit là où il faut?... -interrogea-t-il en défronçant les sourcils...
— Monsieur...
— Qu'est ce que c'est que cette histoire! Quelqu'un qui se vante d'être l'ami du Président de la République n'abandonne pas en pleine rue un malheureux blessé victime d'une main occulte!
Un bref mouvement sur le pas de la porte de la salle à manger lui fit tourner la tête.
— Entrez, général...
— Avec votre permission, Monsieur le Président...
— Ils sont déjà prêts, général?
— Oui, Monsieur le Président...
— Allez-y vous même, général; présentez mes condoléances à la veuve et remettez-lui ces trois-cent pesos que lui envoie le Président de la République pour participer aux frais de l'enterrement.
Le général, qui restait au garde-à-vous, le képi incliné sur la droite, sans ciller, presque sans respirer, s'inclina, récupéra l'argent posé sur la table, tourna les talons et quelques minutes après, partit en voiture avec le cercueil qui renfermait le corps de cet animal.
Tête d'Ange s'empressa d'expliquer :
— J'ai pensé conduire le blessé jusqu'à l'hôpital, mais ensuite je songeai : «Avec une ordonnance de Monsieur le Président, ils s'en occuperont mieux.» Et comme je me rendais ici-même à votre demande et pour vous faire savoir une fois de plus que je ne supporte pas que des scélérats aient tué par derrière notre Parrales Tout Sourire...
— Je rédigerai l'ordonnance...
— On ne pouvait attendre autre chose de celui dont on dit qu'il ne devait pas gouverner ce pays...
Le Président bondit comme vexé.
— Qui?
— Moi le premier, Monsieur le Président, entre tous ceux que nous sommes à soutenir l'idée qu'un homme comme vous devrait gouverner un peuple comme la France, ou la libre Suisse, ou l'industrieuse Belgique ou le merveilleux Danemark!... Mais la France..., la France surtout... Vous seriez l'homme idéal pour guider les âmes du grand peuple de Gambetta et de Victor Hugo !

2 commentaires:

  1. Bravo pour la traduction, j'écris actuellement un exposé: "Les dictateurs sud-américains entre réalité historique et fiction narrative au XXè siècle" et je ne trouve pas d'édition bilingue du roman de M.A. Asturias...Donc merci pour ce passage,
    cordialement,

    B.T.

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  2. Bonjour,
    Après tout ce temps, je vous en prie !
    Très bonne continuation dans votre travail qui doit être passionnant :)

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